de Cristèle Alves Meira (Portugal 2022)
Lua Michel, Ana Padrao, Jacqueline Corado, Ester Catalão, Duarte Pina, Arthur Brigas, Catherine Salée, Martha Quina
Comme chaque été, la petite Salomé retrouve le village familial, niché au creux des montagnes portugaises, le temps des vacances. Tandis que celles-ci commencent dans l’insouciance, sa grand-mère adorée meurt subitement. Alors que les adultes se déchirent au sujet des obsèques, Salomé est hantée par l’esprit de celle que l'on considérait comme une sorcière.
Saluons la démarche de cette cinéaste portugaise (dont Alma viva est le premier long métrage) : filmer le « mystique » dans la rudesse montagneuse, tisser des liens entre le « réel » (et quelle réalité que celle des conflits familiaux suite au décès de l’aïeule !!) et l’invisible (celui qui a hanté la « sorcière » et qui continuera à hanter la petite !) faire cohabiter le tout viscéral organique palpable et le tout a-normal, extra-ordinaire et ce, à travers le personnage de Salomé (-interprété par sa …fille) cette gamine persuadée d'avoir hérité des pouvoirs médiumniques de sa grand-mère bien-aimée, Avó
La réalisatrice lors de la rencontre à l’issue de la projection à Angers (festival Premiers plans) affirmait avoir rendu hommage à une région à ses habitants à leur culture, hommage aussi au cinéma (thématiques déjà traitées dans mes courts métrages) bref c’est une histoire de famille…. élargie
Souvent sa caméra est si proche des personnages (outre le duo Avo/Salomé) qu’elle en devient « tactile » comme pour associer, simultanément, le toucher la découverte et l’exploration et la « sensorialité » peut être proche de la sensualité (cf Salomé sur la mob). Plusieurs plans vont d’ailleurs isoler deux personnages enlacés ou tels des gisants (la grand-mère et Salomé, Salomé et sa mère, Fatima et sa nièce)
Voici un très gros plan sur un œil. Qui regarde ? et quoi ? le plan s’élargit : Salomé, les bougies, le mort.
Dès ce premier plan apparaissent en filigrane deux thématiques: celle de l’œil, du regard (et le rôle de l’oncle aveugle sera significatif , car sa cécité lui donne accès à des choses muettes, à l’indicible ; un complice le chien, dont le regard va au-delà des regards humains !!!) et celle de la mort, (c'est elle qui ouvre et clôt le film); vers la fin, dans la séquence du cimetière voici un plan en plongée, sur la famille réduite à sa plus simple expression et le groupe d’instrumentistes qui par deux fois avaient accompagné le cortège funèbre, avant que ne s’accomplisse le « miracle » de la pluie dont le ruissellement effacera les souillures !!! ) ; mêler le rite chrétien et le mysticisme païen c'est ainsi que la mort -partie intégrante de la vie- est traitée (ou perçue?)
Le plan final, vaste panoramique et vue aérienne sur l’environnement fait de lacets (circulation des humains) dans les montagnes austères (nature) nous invite, après avoir quitté l’âme du village Trás-os-Montes (de l’autre côté des monts »), à déceler dans cette cartographie le réalisme magique inscrit dans l’âme même du paysage
Colette Lallement-Duchoze
NB L'incendie n'a absolument rien à voir avec des images d'archives (feux de forêts qui ont dévasté le Portugal) ; il s'agit d'un "trucage" et cela s'inscrit dans la condamnation de la famille pour sorcellerie