de Davy Chou (2022 Sud Corée)
avec Park Ji-min, ( Freddie) Oh Kwang-rok (le père biologique de Freddie) Guka Han (Tena) Sun-Young Kim (la tante coréenne) Louis-Do de Lencquesaing (André) Hur Ouk-sook (la grand-mère) Régine Vial (la "mère" de Frédérique) Choi Cho-woo :( la mère biologique de Freddie)
Festival de Cannes 2022 Section Un Certain Regard
Sur un coup de tête, Freddie, 25 ans, retourne pour la première fois en Corée du Sud, où elle est née. La jeune femme se lance avec fougue à la recherche de ses origines dans ce pays qui lui est étranger, faisant basculer sa vie dans des directions nouvelles et inattendues.
Un film complexe qui serait à la fois recherche des origines (une Française d’origine coréenne revenue sur sa terre natale ; un prétexte ?), quête existentielle (à partir de la thématique de l’adoption, laquelle est aussi pré-texte) ; un film à l’esthétique particulière avec laquelle Davy Chou nous a familiarisé depuis Diamond island, -( son premier long métrage à la fois solaire et ténébreux sur Phnom Penh); un film où la temporalité traitée par ellipses et par « blocs » étalés sur plus de 10 ans- se prête au parcours chaotique dans la construction de soi. Construction qui passerait par une déconstruction -à l’instar de tout parcours dit initiatique ?
Traversé par des secousses, par la rébellion aussi, voici un film où la caméra souvent virevolte et tourbillonne entraînant le spectateur dans des bifurcations comme autant de fausses sorties, l’obligeant à emprunter les "diagonales du fou" et se perdre dans des surimpressions- à l’instar de ce vol initialement prévu pour Tokyo, mais annulé à cause d’un cataclysme, et …détourné vers Séoul…c’est du moins ce qu’affirme Freddie à sa mère adoptive, si inquiète d’être sans nouvelle de "sa" fille
Freddie le personnage principal est de tous les plans. Au cours de cette décennie, elle se "métamorphose" littéralement sous nos yeux : physiquement - traits du visage maquillé ou non, coiffure, habillement – mais aussi dans ses relations avec autrui -cinglantes avec le père biologique ou l’amant éconduit, irrévérencieuses avec la mère adoptive, impolies avec les représentants officiels d’organismes d’adoption, mais aussi aguicheuses -avec ce VRP de l’industrie de l’armement (Louis-Do de Lencquesaing) … Et pourtant une scène empreinte de pudeur, d’émotion contenue restera gravée -dans la mesure où elle ne peut qu’emporter l’adhésion du spectateur ; les deux visages -celui de la mère biologique et celui de Freddie – fusionnent dans une figure ovale où la main vigilante caresse les pleurs, un ovale occupant tout l’espace visuel -avant que le plan ne s’élargisse- Réconciliation de soi avec soi ? Et que penser de ce dernier plan où Freddie interprète au piano une partition, celle léguée par le père biologique ?
« Tu entends la musique » ? « Elle vient de l’intérieur »
Ne serait-ce pas le sens de ce film ? L’électron libre ne serait que l’image (furtive) que les autres attendaient de Freddie ; cette nomade de l’espace et du temps est convaincue, quant à elle, de l’existence d’une autre Vérité, enfouie au plus profond et que le « choc » des cultures aura (peut-être) ciselée….
Un film à voir, de toute évidence !!
Colette Lallement-Duchoze