22 décembre 2022 4 22 /12 /décembre /2022 06:55

de Hlynur Pálmason (Danemark Islande 2021) 

 

avec : Elliott Crosset Hove (Lucas)  Ingvar Eggert Sigurôsson (Ragnar)  Victoria Carmen Sonne

 

 Cannes 2022 Un certain Regard

 

À la fin du XIXème siècle, un jeune prêtre danois arrive en Islande avec pour mission de construire une église et photographier la population. Mais plus il s’enfonce dans le paysage impitoyable, plus il est livré aux affres de la tentation et du péché́.

Godland

Dans la lignée de Dreyer voici un film qui frappe par ses qualités plastiques et sa réflexion sur les croyances religieuses.

Mais foin de toute thaumaturgie !

Godland semble placé sous le signe de la dualité et/ou du double. A l’instar du réalisateur -mais harnaché d’un matériel lourd-- Lucas cherche à immortaliser la lumière, ses diffractions dans une nature aussi somptueuse que dangereuse, ainsi que les habitants dans des portraits au format proche de celui utilisé par Hlynur Pálmason, le 4,3 aux coins arrondis.

Aux rapports hiérarchiques entre Danois (cf scène d’ouverture, une caméra fixe, pour un face à face entre un supérieur et le disciple Lucas, dans une blancheur bleutée, où l’un dispense les ordres tout en mangeant goulûment et l’autre acquiesce, servile) font écho les rapports colons/colonisés, (langue imposée et langue maternelle, arrogance et condescendance de Lucas le Danois face aux autochtones)

Le combat entre la chair et l’esprit, la quête impossible du « pardon » (le guide local, le rustre Ragnar -double de Lucas(?), répète vers la fin du film sous forme de litanie et sur le ton de la complainte "prie pour moi", qui ai péché  …et quels péchés !!!) ; les sacrifices et meurtres comme autant de signes d’une ordalie

 

Mais ce film est avant tout une admirable épopée qui ne pourra qu’envoûter le spectateur tant la beauté y est sublime et magnifiée voire terrassante ! Une épopée aux allures de chemin de croix (les premières chutes de Lucas épuisé après avoir traversé une mer agitée, la Croix destinée à l’église rejoint les abysses d’une rivière, la mort du fidèle traducteur celle de chevaux, le personnage principal en butte à la fois aux éléments et aux hommes, ses affres tant physiques que spirituelles). Histoire d’une forme de "désintégration morale"  (histoire de quelqu’un qui avait des idéaux et qui est progressivement anéanti et se retrouve mis à nu »)

Et cette « aventure mystique » a pour cadre une nature que le réalisateur filme comme un personnage à part entière. Admirez la palette: bleu-marin, vert mauve des plaines,  rouge incandescent des laves, brun chaud de la terre des robes des chevaux, blanc cassé poudreux! Contemplez ces panoramiques et ces plans larges où l’homme paraît si minuscule perdu dans une immensité indomptée. Celle d’une nature que l’on ne peut apprivoiser dans sa rugosité sa minéralité et ses ciels tourmentés. Tempêtes vents pluie neige en harmonie d’ailleurs avec la tempête intérieure qui meurtrit Lucas. Alors que les meurtrissures de la chair seront filmées à différents stades de la putréfaction au fil des saisons (dans la confusion des règne animal et humain) 

 

"tu seras désormais un  tapis de fleurs" ( "prophétise" Ida, agenouillée éplorée, en rendant un ultime hommage)

Comme  un  devenir de l'impermanence ?

 

Un film à ne pas rater !!

 

Colette Lallement-Duchoze

 

Pour info

 

Elliott Crosset Hove  est Emil dans "winter brothers"  (Winter Brothers - Le blog de cinexpressions)

 Ingvar Eggert Sigurôsson  est Ingimundur dans "un jour si blanc"  (Un jour si blanc - Le blog de cinexpressions)

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