de Kornel Mundruczo (Hongrie Allemagne 2021)
avec Lili Monori Annamaria Lang Harald Kolaas
Présenté en Compétition officielle festival de Cannes 2021
Rescapée des camps nazis, une dame dans la force de l'âge tente de transmettre ses douloureux souvenirs à sa fille et son petit-fils, peu intéressés.
Trois fragments
Trois générations d’une même famille Eva, Lena, Jonas
Trois lieux Auschwitz, Budapest, Berlin.
Comment s’est transmis un traumatisme ? Trois questionnements:
Comment y survivre, comment le vivre, comment essayer de s’en affranchir tout en respectant un « devoir de mémoire » ?
Car Evolution n’est pas un énième film sur la Shoah; c'est, de l’aveu même du réalisateur, " un film sur notre identité contemporaine. Cependant, nous devions regarder en arrière et nous confronter à sa composante historique pour comprendre pourquoi l’identité est désormais (évolution) si fluide "
Et voici trois manières singulières de filmer ce « trauma ».
En I (Eva ou le traumatisme.) Un long plan séquence de plus de 15’. Nous pénétrons dans un univers glauque avec trois hommes qui vont « lessiver » ce qui progressivement s’imposera comme ayant été le lieu de l’innommable, quand ils extirpent des grillages ou des interstices, des cheveux, par touffes de plus en plus denses… avant que ne retentissent les vagissements d’un bébé/enfant. Nativité sordide que celle d’Eva arrachée aux entrailles de l’horreur. Et quand nous quittons l’obscurité pour la « lumière » quelques plans (dont un aérien sur le camp enneigé) rappellent l’évacuation des prisonniers du camp d’Auschwitz par l’Armée Rouge
En II Lena (grand portrait du passé communiste) voici un nouveau long plan séquence dans le huis clos d’un appartement où vont « s’affronter» deux discours, deux douloureux "ressassements" (mère et fille de la minorité juive à Budapest) « tu voulais survivre alors que je ne demandais qu’à vivre » reprochera Lena à sa mère Eva…
En III alternance entre extérieurs (un quartier de Berlin) et intérieur (appartement où vit Jonas avec sa mère Lena). L’adolescent refuse d’être réduit à une identité (juive en l'occurrence) et c'est par une idylle amoureuse qu'il s’en émancipera
Mais de l’un à l’autre de ces fragments circulent des « symboles » dont certains un peu trop appuyés (l’eau et le feu par exemple dans leur double et paradoxale connotation de dévastation et purification)
Un film choc ? comme se plaisent à le répéter certaines critiques ?
Je ne sais…en tout cas un film singulier; mais où se devine ici et là, la hâte avec laquelle il a été réalisé :13 jours -entre Budapest et Berlin
Un film à voir assurément !
Colette Lallement-Duchoze
PS la projection est précédée de la diffusion du court-métrage documentaire "Cell 364" de Mathilde Babo et Zoé Rossion (2020 France -Allemagne)
"un ancien détenu de la Stasi Hans-Jochen Scheidler, nous livre depuis son ancienne cellule un témoignage glaçant qui questionne la pérennité de nos démocraties contemporaines."
Une phrase pertinente à méditer " qui dort dans une démocratie se réveille dans une dictature"