17 novembre 2021 3 17 /11 /novembre /2021 07:37

de Xavier Giannoli 2021 

avec Benjamin Voisin (Lucien) Cécile de France (Marie-Louise-Anaïs de Bargeton) Vincent Lacoste (Etienne Lousteau) Xavier Dolan (Raoul Nathan) Jeanne Balibar (marquise d'Espard) Salomé Dewaels (Coralie) Gérard Depardieu (Dauriat) André Marcon (baron du Châtelet) Jean-François Stévenin (Singali) Louis -Do de Lencquesaing (Andoche Finot)

 

présenté en compétition officielle à la Mostra de Venise 2021

Lucien est un jeune poète inconnu dans la France du XIXe siècle. Il nourrit de grands espoirs et veut forger son destin. Il quitte l'imprimerie familiale de sa province natale pour tenter sa chance à Paris au bras de sa protectrice des arts. Rapidement livré à lui-même dans cette ville fabuleuse, le jeune homme va découvrir les coulisses de ce monde voué à la loi du profit et du faux-semblant

Illusions perdues

 

Au concert de louanges -spectateurs et critique dite officielle- j’ose apporter quelques bémols

 

Si l’adaptation est soignée dans la « reconstitution » -costumes, ambiances, jeux et symboliques des dorures, artificielles contrastant avec la blondeur des champs de la première partie, choix de la musique- elle est peu imaginative (et l’on se sent presque obligé de « comparer » avec d’autres adaptations, d’autres films dits « costumés » qui emportent l’adhésion par leur puissance suggestive) ; impression désagréable d’assister (comme dans un feuilleton) à une succession de tableaux en costumes (un Balzac pour le petit écran faussement dépaysant)

Ajoutons un phrasé symptomatique de l’exercice de récitation, (qui culmine dans les fausses dictions théâtrales) et des personnages figés (ceux de la haute), car corsetés dans leurs « principes » et nous voici plutôt au musée Grévin qu’à l’Opéra (ce qui n’enlève absolument rien aux interprétations de J Balibar Marcon ou Cécile de France)

Si le réalisateur Giannoli « connaît » le milieu de la presse (à l’instar de Balzac en son temps) s’il en dénonce (jusqu’à la caricature) les dévoiements, s’il conchie l’emprise de l’argent, ses constants parallèles avec notre époque ne sont pas traités comme des « échos » -effets de miroir- mais se limitent à de simples clins d’œil de satisfecit (un banquier au gouvernement, allusions au canard enchaîné et à médiapart) (et que dire de la présence de pigeons voyageurs colportant des fausses nouvelles vite assimilés par le spectateur à twitter et aux réseaux sociaux faiseurs de fake news, sinon que sans incidence aucune sur la « trame » elle est comme décorrélée, « gratuite » et partant, artificielle)

Le recours à une voix off, -censée citer le texte de Balzac- en palliant les difficultés d’une adaptation/ illustration, pêche précisément par cette entourloupe (des informations « importantes » seront reléguées au second rang ou expédiées en une courte phrase vite illustrée) ; que cette voix soit celle de Nathan (Xavier Dolan) journaliste patenté de la presse royaliste, met le spectateur comme en surplomb mais surtout joue le rôle de « béquille narrative » (sous-entendu d’ailleurs dans sa dernière phrase)

Le plan où le jeune Lucien -qui a compris les rouages malicieux et pervers d’un système- est vu en contre plongée alors que l’éditeur (G Depardieu) en simple plongée, illustre la volonté farouche du premier jusque-là victime de quolibets et la perte de pouvoir du second (lui l’inculte, fier de « faire » et défaire » l’opinion) c’est l’illustration d’un « basculement » dans l’itinéraire de l’arriviste Lucien, l'acmé avant la chute... Mais là encore ni élégance ni puissance suggestive -attendues!

Que dire de ce plan (fugace certes) où une liasse de billets est fermement tenue à l’horizontale sur le pénis ? si symbole il y a, ce serait ou tendancieux ou pervers ou cynique ou tout cela à la fois

Les « fameux embarras » de Paris (cf La Bruyère dans les Caractères XVII°, Montesquieu dans les Lettres persanes XVIII°) font l’effet pour cette période de la Restauration (XIX°) de "déjà vu"  (carrioles calèches piétons affairés mouvement perpétuel)

 

Simples bémols

 

Tout cela ne remet nullement  en question le brio de certaines interprétations (dont celle de Benjamin Voisin récemment vu et apprécié dans le film d’Ozon Eté 85) et l’immense plaisir de voir Jean François Stévenin (dernier rôle à l’écran)

 

Colette Lallement-Duchoze

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

Mode d'emploi

Ce blog est destiné à collecter nos ressentis de spectateurs, à partager nos impressions sur les films (surtout ceux classés Art et Essai).

Envoyez vos articles ou vos réactions à: artessai-rouen@orange.fr.

Retrouvez aussi Cinexpressions sur Facebook

 

 

Recherche