15 octobre 2021 5 15 /10 /octobre /2021 05:32

de Gessica Généus (Haïti France 2020)

avec Néhémie Bastien (Freda ) Djanaïna François (Esther)  Fabiola Rémy (Jeannette)  Gaëlle Bien-Aimé (Géraldine) Jean Jean, Rolaphton Mercure,  Cantave Kerven  

 

Présenté au festival de Cannes 2021 Section Un certain regard 

 Mention spéciale découverte Prix François Chalais

 

 

Freda habite avec sa mère, sa sœur et son frère dans un quartier populaire d’Haïti. Ils survivent avec leur petite boutique de rue. Face à la précarité et la violence de leur quotidien chacun cherche une façon de fuir cette situation. Freda décide de croire en l’avenir de son pays.

Freda

 

Freda 8 minutes de standing  ovation à Cannes 2021

Freda film féministe, et  témoignage vivant qu’en Haïti on peut réaliser des choses

 

Même si la mère Jeannette, la sœur Esther, la cousine Géraldine offrent une palette de portraits de femmes en lutte, c’est Freda le personnage éponyme, qui concentre/ synthétise « toutes les luttes tensions et promesses haïtiennes »

Freda une étudiante révoltée/ un pays ! Un pays avec les démons de son passé ? son présent amnésique ? Pays que l’on veut quitter ? (c’est le choix du frère Moïse:  laissant une mère éplorée à l’image de son île il a choisi le Chili pour nouvelle terre d’accueil; Esther -intéressée, vénale, contrainte ?- a opté pour le mariage avec un sénateur véreux et autoritaire, elle en portera les stigmates !) Freda longtemps en proie au  dilemme : rester ou rejoindre en République Dominicaine son amoureux Yeshua,  fera corps avec sa famille, avec son île (un plan fixe prolongé sur la fusion mère/fille clôt d’ailleurs le film)

 

Le contexte social et politique de l’île est suggéré -quand il n’est pas explicitement montré- par la construction en strates superposées et une succession de tableautins (caméra rapprochée pour les scènes d’intimité familiale et plans larges pour les scènes en extérieur, les manifestations) ; à l’apparent désordre répond une logique plus souterraine, celle précisément des causes identifiables, et parmi elles : l’ambiance délétère de la corruption (scandale du petrocaribe, les relents du colonialisme ( tu croyais quoi ? une négresse et un mulâtre dans ce pays ne se rencontrent que dans le noir ) le formatage de la jeunesse (les quelques incursions dans une salle de cours disent en peu de mots tout un passé qui contamine un présent, la « fameuse » dette française « punitive » occultée dans l’enseignement)

 

Le point de repère qui fédère cette famille/microcosme est le 33 d’une rue d’un quartier populaire de Port -au- Prince. - plan récurrent sur la façade et sa boutique,  en frontal comme pour en décadenasser les arcanes qui la relient à  la minuscule maison désertée par les « hommes ». Portes et heurtoirs, comme autant de zigzags ou de va-et-vient entre un ici et un là-bas, entre un présent faussement douillet et un passé qui entre par effraction ou l’appel d’un futur incertain ? Voici la mère aimante versée dans les pratiques du vaudou, une mère tiraillée entre le besoin de  "protéger"  ses enfants et celui de  "survivre" . Imposant son  " être là" ,  elle se fera  néanmoins tancer par sa fille qui lui rappellera cruellement un passé déshonorant et des faiblesses (inadmissibles) dont le présent porte les séquelles.... Jeannette ne devient-elle pas  par métaphore la   "mère patrie"  que l’on ose regarder en face, et que l’on va débarrasser de ses oripeaux ?

 

Avec un grand sens du cadre et surtout de  la couleur, en alternant scènes d'intérieur et d'extérieur, violence et accalmie, en rendant hommage à la sororité, Gessica Geneus  irise de la langue créole un film éminemment politique dominé par l’espoir ! et  le souffle de la Vie saisi  à fleur de peau !

L’espoir c’est aussi tout simplement réaliser qu’on est là, qu’on est vivant, qu’il y a encore de l’espace pour créer cet avenir que l’on souhaite. C’est sûr que ça demande une énergie que, des fois on n'a pas, parce qu’on est épuisés par cette quête quotidienne de survie. Mais on est toujours là (propos de la réalisatrice Gessica Généus)

 

 

A voir absolument !

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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