de Cédric Jimenez (France 2019)
avec Gilles Lellouche (Grégory) Karim Leklou (Yassine) François Civil (Antoine)
Présenté hors compétition festival Cannes 2021
2012. Les quartiers Nord de Marseille détiennent un triste record : la zone au taux de criminalité le plus élevé de France. Poussée par sa hiérarchie, la BAC Nord, brigade de terrain, cherche sans cesse à améliorer ses résultats. Dans un secteur à haut risque, les flics adaptent leurs méthodes, franchissant parfois la ligne jaune. Jusqu'au jour où le système judiciaire se retourne contre eux
(Dès le prologue, le public est averti: BAC Nord est une fiction librement inspirée du scandale de 2012 au sein de la brigade anticriminalité de Marseille : 18 de ses membres avaient été déférés en correctionnelle pour trafic de stupéfiants et rackets; tout comme le générique de fin l'informera sur le "destin" des trois baqueux à leur sortie de prison)
BAC Nord - fiction aux allures de documentaire parfois- est un film « nerveux » ( de par son rythme) viril (au sens où ça gueule ça éructe ça cogne ça montre ses biceps) obéit à un tempo -alternance séquences « musclées » au rythme effréné et scènes plus intimistes-, avec pour acmé la longue et impressionnante séquence d’assaut ; la mise en scène est « immersive » (j’avais proposé de ne pas trop introduire les actions et les personnages pour être toujours dans le vif, revendique le réalisateur) Gilles Lellouche faisant la promo de ce film use et abuse de cette épithète ; de même, en assimilant Bac Nord à un « western urbain » non seulement il insiste sur le côté « grand spectacle » mais il semble oublier que les poursuites les chevauchées le manichéisme typiques du western américain avaient contribué -de par leur force politique intrinsèque - à réécrire l’histoire des USA….
En faisant des « quartiers nord » (que d’ailleurs il ne filme pas) une masse d’affreux jojos de dealers de balances Cédric Jimenez occulte (délibérément ?) une réalité « sociale » que d’autres cinéastes -tout en refusant les clichés réducteurs et manichéens- ont su porter à l’écran (cf Les Misérables de Ladj Ly)
Certes des aspects et non des moindres sont abordés parfois frontalement (la politique du chiffre principe cardinal depuis le passage de Nicolas Sarkozy au ministère de l’Intérieur ; plus je fais mon métier moins je le fais déplore un policier cantonné à des tâches administratives; les « rodéos urbains » contrôlés; et l’IGPN cette police des polices tant haïe de ceux qui œuvrent sur le terrain) MAIS leur traitement dans ce film équivaut trop souvent à exonérer les baqueux ripoux de toute responsabilité
Suivre des unités d’intervention (ici 3 baqueux Grégory, Yassine et Antoine, interprétés par Gilles Lellouche Karim Leklou, et François Civil) est une chose. En faire les victimes à la fois d’un système gangrené qui exige du « rendement », et des "voyous" qu'ils sont censés "désarmer", se contenter de survoler la situation des quartiers nord, est un choix à la fois politique et idéologique.
On en doute ? il suffirait pourtant d’analyser quelques scènes, d’isoler quelques plans (cf dans la deuxième partie (après l’arrestation) la façon de filmer au plus près les visages les regards apeurés les pleurs qui perlent sur la joue de Gilles Lellouche (qui a la larme facile dans ce film), la réunion des « camarades » chez la femme de Yass (justifiant leur désolidarisation) ; bien plus, filmés au plus près, soumis à de fortes pressions, gardant leur « sang-froid » face à une « meute » qui éructe hurle provoque, les 3 baqueux forcent l’admiration…!!.
Oui! ils ont franchi la ligne jaune (récupération de l’argent des trafics, partage de butin, détournement de l’argent saisi, rémunération des indics avec de la drogue) mais ne sont-ils pas les boucs émissaires de jeux politiciens et des victimes ...C'est ce qu'affirme, illustre et démontre Cédric Jimenez Conclusion le rackett se fait en toute bonne foi, tout errement est justifié
Condamnés, ils clameront leur innocence (sens étymologique)
Pôvres pôvres baqueux !!!!
Ite missa est
Colette Lallement-Duchoze