de Tim Mielants (Belgique Pays-Bas) 2019
avec Kevin Jansens, Jemaine Clement, Hannah Hoeskstra, Bouli Lanners
Présenté en sélection officielle au festival d'Aubagne (30 mars 4 avril 2020) ce film a reçu le Grand Prix pour la musique originale (compositeur Geert Hellings ) et le prix d'interprétation pour l'ensemble de la distribution
Patrick est employé dans le camping naturiste de son père. Il accomplit fidèlement les tâches que les campeurs lui donnent. Sur son temps libre, il fabrique des meubles. Mais quand il perd son marteau préféré et que son père est retrouvé mort, Patrick se met à soupçonner tout le monde
"Parfois, on trouve ce que l’on cherche quand on arrête de chercher ce qu’on ne trouve pas."
Une vue aérienne sur un corps tout blanc tout nu faisant la planche sur un plan d’eau, infiniment petit face à l'infiniment grand; ce sera notre premier contact avec Patrick le personnage éponyme, .Quand la caméra s’approche de son visage c’est le sourire ensoleillé du bien-être. Puis caméra à l’épaule, nous le suivons de dos, fesses à l'air, regagner le camp naturiste géré par son père. Telle une déclinaison processionnaire, les salutations des estivants ponctuent son passage... " bonjour Patrick"
Mais dans son "sanctuaire" (lieu de son épanouissement, établi où il fabrique des meubles) un constat sans appel : un marteau a disparu (gros plan sur une béance criant l’absence au milieu des 11 marteaux restants). Une perte incompréhensible. Une obsession : retrouver l’objet précieux ; obsession qui vire à la monomanie. Tel est le sujet d’une " intrigue" où le suspense est savamment entretenu et où les rebondissements sont parfois cocasses (interrogatoire musclé, renversement des données spatiales suite à la bagarre qui oppose Patrick et Herman). La quête du marteau "manquant" va se conjuguer avec un autre itinéraire, celui d’une "initiation"
Le marteau en effet, devient un outil maïeutique : déclencheur de l’intrigue, il sert de révélateur (dans sa quête obstinée Patrick sera confronté aux "bassesses" de certains et à des "découvertes" sur le passé de son père), il est l’instrument nécessaire à un "éveil" qui le guidera vers l’autonomie (car à 38 ans le personnage de cette fiction vit sous l’égide du père -avant qu’il ne meure- et la sollicitude d’une mère bienveillante, comme un enfant dépendant et immature (?) Et l’acteur Kevin Janssens avec ses gestes dégingandés, sa frimousse de renfrogné, ses yeux absents, son mutisme (même dans ses ébats avec la femme d’Herman) interprète avec maestria le personnage (un rictus un battement de cils ou de paupières et c'est comme un paysage intérieur qui se donne à lire)
C’est l’été. La lumière se diffracte. Des surplombs sur la forêt (scène d’ouverture qu’accompagne la musique de Geert Hellings; elle servira d'ailleurs de leitmotiv) des plans larges ou serrés mais qui n’enferment pas (et ce magnifique plan lors de la dispersion des cendres où la mère/veuve, guide suprême, se détache des touristes lesquels seuls ou en duos font corps avec la verticalité des arbres dans une ambiance presque fantomatique); dans ce microcosme le réalisateur fait alterner scènes d’extérieur à la lumière vibrante et scènes d’intérieur aux couleurs souvent cuivrées.
Nous sommes dans un camp naturiste. À ce propos il est intéressant de constater que seule la mère (aveugle) porte des vêtements....sa cécité l’empêche de voir les corps nus, mais elle accède à d’autres vérités que précisément la nudité maquille(ait). La nudité ou le camouflage de…?? Et la jeune avocate ("compagne" du chanteur) ne pactise pas avec le protocole de la chair mise à nu; le naturisme, une affaire de quinquas ou sexagénaires ? (du moins dans ce film : c'est un camping namurois prisé par des naturistes flamands)
Un film à l'humour souvent "décalé" -même si un spectateur français ne peut comprendre les arcanes de la langue néerlandaise- ; un film à voir (dans un futur proche??...)
Colette Lallement-Duchoze
Dans les années 80, au cœur d’une forêt ardennaise, on découvre un camp de nudistes géré par un père âgé et malade et son fils introverti, Patrick, qui, lors de ses moments libres exerce ses talents de menuisier. Concomitamment à la mort du père, disparaît un des marteaux de Patrick. Ce dernier se lance alors dans la recherche méthodique et obsessionnelle de ce marteau, afin d’éviter d’affronter la perte de son père et les questions existentielles qui le tourmentent.
Cette enquête nous fait découvrir les différents locataires du camp dont la nudité contraste avec la part de mystère et d’étrangeté que renferme chacun d’entre eux.
J’ai été particulièrement sensible aux jeux de lumière que créent les ombres des conifères : la lumière chaude et intense qui filtre à travers les cimes apaise et allège l’atmosphère a priori oppressante de ce décor sylvestre (quiconque s’est déjà promené dans une plantation d’épicéas comprendra).
Certaines scènes cocasses, comme ce conseil d’administration où des corps nus et marqués par le temps, assis autour d’une table en U, discutent tout naturellement de problèmes financiers, ou lorsqu’une caravane se retrouve sur le flanc lors d’une empoignade, font sourire.
Mais on reste sous tension, car à intervalles réguliers on retrouve l’établi de l’ébéniste avec ce marteau qui manque à l’appel. Le retrouvera-t-il ?
Fabien P
Bruxelles le 12/04/2020