de Stany Cambot (2019)
avec Michel Lescarbotte, Jean-Marc Talbot
Produit par Christophe Hubert (l'Echelle inconnue)
L'épidémie de Covid-19 a reporté ad vitam l'avant-première en salle du film «Blouma» de Stany Cambot. Et puisqu'un film vit d'être vu, Echelle Inconnue décide de le diffuser en ligne, dès maintenant, gratuitement, sous licence libre Creative Commons CC-BY-NC-ND, jusqu'à la fin du confinement.
https://artitube.artifaille.fr/videos/watch/bb858d2b-94f2-46b3-85a7-0c70c3c8cec3
https://vimeo.com/408941338/412d2434e5
https://www.youtube.com/watch?v=B43IjMbhznU&t=1s
"Depuis 30 ans, un bouquet de roses dans les bras, Cacahuète sillonne les nuits de Rouen. Ce soir une raison supplémentaire le pousse à traverser la ville : la recherche de " Mémoires " écrits en trois langues inconnues par son ami décédé…"
Extérieur nuit port de Rouen, deux voix off, une voie ferrée, des mots comme des personnages sur l’écran, avant que n’apparaisse en grosses lettres le titre Blouma, un tel prologue encode de toute évidence ce "documentaire marché en trois langues "
Collision des temporalités, effets spéculaires, montage parallèle, deux « destins » -celui de Cacahuète et celui de Nono. (et la porte de la chambre de l’hôtel que l’on franchit devient par métaphore celle qui donne accès au souvenir au passé) tout cela va illustrer les promenades/enquêtes auxquelles nous convie Stany Cambot
Cacahuète (souvent filmé de dos) arpente les rues de Rouen avec son bouquet de roses ; ses pauses dans des bars, ses discussions avec des "potes" sont le prélude à d’autres "voyages" vers un passé individuel et collectif que la parole ressuscite. Pour rendre compte de la richesse lexicale des langues pratiquées, - manouche argot verlan louchében- le cinéaste a choisi d’incorporer les mots, leur traduction, directement dans l’image en jouant sur leur police et leur répartition (équivalent des notations infra-paginales dans un texte écrit, alors que le voix off sur l’historique la genèse serait l’équivalent d’une forme de métalangage) le mot est comme une note sur une partition, et devient un personnage à part entière
Cette promenade/exploration de l’espace (Rouen et certains de ses quartiers) du temps (la nuit, le passé recomposé) et de la langue (dont nous palpons la chair) est aussi profondément humaine. On devine l’empathie de l’auteur pour Cacahuète et Nono des personnages qui ont triomphé très jeunes de tant de contingences/obstacles (de gros plans sur le visage, une main qui écrit, sur la jambe de fer, sur la jante du fauteuil roulant ou même un silence habité le prouveraient aisément)
Après un passage écran blanc, c’est l’aube venue sur les quais ; la foire Saint-Romain s’est endormie. Dans cette dernière séquence Cacahuète seul sur l’immensité du quai vénère dans un geste ultime la Mémoire de son ami Nono…
Un film que je vous recommande vivement
Colette Lallement-Duchoze