de Stéphane Demoustier
avec Melissa Guers, Roschdy Zem, Chiara Mastroianni, Anaïs Demoustier, Annie Mercier
Bruno et Céline voient leur vie de famille basculer lorsque Lise, leur fille de 17 ans, est accusée du meurtre de son amie Flora. Deux ans après le crime, Lise vit avec un bracelet électronique, en compagnie de ses parents et de son petit frère, Jules. Alors que le procès approche, la vie de Bruno ne tourne qu'autour de ces quelques jours au cours desquels il sait que le destin de sa fille va se jouer, au beau milieu d'une cour d'assises.
Au tout début, une scène en bord de mer, filmée en plan large. Nous n’entendrons pas les paroles échangées entre les protagonistes (père mère et deux enfants) . Arrivée de policiers, (une brisure dans un univers apollinien?) "embarquement" de la jeune fille qui, docile, prend juste le temps d’enfiler un tee-shirt... Or précisément l’indifférence de Lise lors de son "arrestation" - car elle est soupçonnée d’avoir tué sa meilleure amie- sera "utilisée" par l’avocate générale comme "élément à charge" ,"preuve" indubitable de culpabilité …
Ainsi dès le début le ton est donné, celui de l’impassibilité. Et la jeune Melissa Guers dont c’est le premier rôle parvient par un regard, un silence, une moue, une réponse inattendue -car elle heurte tout simplement le bon sens ou s’inscrit en faux contre les convenances- ou des réponses laconiques réduites à des monosyllabes, à rendre palpable cette "impassibilité" lors de son procès. Convaincue de son innocence, imperturbable, elle donne l’impression d’être extérieure à ce "théâtre" des apparences,. Le spectateur va découvrir en même temps que les jurés, -et les parents d’ailleurs-, certains aspects de sa personnalité - ou du moins des zones d’ombre que des vidéos (ah ces vidéos compromettantes qui circulent sur les réseaux sociaux…) vont "éclairer "
Le cinéaste affirme avoir voulu "que l’enjeu intime supplante l’enjeu judiciaire" . Et de fait La fille au bracelet est moins un film de "procès" , une quête de la "vérité" , où triomphera ou non l’intime conviction -face au manque de preuves irréfutables ou à l’incongruité de certaines-, qu’un questionnement sur l’incommunicabilité entre parents et enfants, sur l’incompréhension des aînés, sur les arcanes du monde des adolescents. Ce que l’avocate de la défense (Annie Mercier) exprimera dans sa plaidoirie en une suite accumulative d’interrogations dites "oratoires" (que savons-nous de ces adolescents, que savons-nous de leurs blessures, de leur rapport à leur corps...etc...)
Certes, les séquences à huis clos frappent par une mise en scène impeccable - cadrages, plans fixes ou légers mouvements de caméra, refus du pathos des morceaux de bravoure et des effets de manche, jeu symbolique de la grille/séparation, lenteur calculée des prises de paroles (hormis celle de l’avocate générale très -trop- fougueuse), précision méthodique qui va de pair avec une froideur clinique parfois glaçante
Mais hors tribunal, le film "confine dans une suggestion psychologique pesante et sans risque" (Libération). En témoigne le "rôle" dévolu aux parents -même si des plans rapprochés sur le visage du père (Roschdy Zem) ou les interventions de la mère (Chiara Mastroianni) tentent de "sonder" l’inquiétude...(celle ...de parents...on ne change pas de point de vue...)
Est-ce à cause de ce décalage (certainement délibéré) que le film ne convainc pas ?
C’est du moins mon "intime conviction"...;
Colette Lallement-Duchoze