de Bas Devos (Belgique)
avec Saadia Bentaïeb, Maaik Neuville, Nora Dari
présenté au festival de Cannes (Quinzaine des Réalisateurs)
Meilleur réalisateur au Cairo International film festival 2019
Au retour d’une journée de travail, Khadija s’endort dans le dernier métro, et se réveille, loin de chez elle, au terminus, à l’autre bout de la ville. Commence alors l'aventure ordinaire d'une nuit d'exception. Khadija, traverse Bruxelles endormie, fait des rencontres, donne de l'aide et en reçoit, le temps unique de toute une nuit, comme un instantané.
Un long plan fixe sur un intérieur modeste -tv, table, canapé, bibelots-; une lumière qui s'amenuise avec le moment crépusculaire; une voix off qui mezza voce s'interroge "et si tout à coup un étranger devait entrer dans cette pièce, que verrait-il? qu'entendrait-il? que sentirait-il?" C'est l'ouverture de ce film. Et l'on pense à Chantal Akerman. Cette impression se confirmera tout au long de "ghost tropic"
Laconisme (peu de paroles échangées lors de rencontres passagères avec un SDF, une pompiste, des flics) en harmonie d'ailleurs avec la discrétion du personnage; plans fixes; alliance entre les éclairages de nuit et les ombres, lumières et ombres portées, format 1,3, tels sont les choix du réalisateur pour évoquer cette déambulation nocturne. Et comme son projet était de porter à la lumière des "femmes sous représentées sous exposées" qu'il voit "dans la Cité, à Molenbeek ou dans le métro" son personnage, une femme de ménage pudique, sera (et sans pathos) de tous les plans : dès le début c'est son visage son fou rire qui impressionnent puis elle sera cette passagère de la nuit happée par l'atmosphère de la ville qu'elle arpente, fatiguée et inquiète
Un film où espace et temps se conjuguent dans l’hétérogénéité du tissu urbain: Bruxelles. Les façades maquillant leur au-dedans, des lieux désertés par l'homme dans l'endormissement de la nuit, quelques personnes -furtives silhouettes ou fantômes sinistres(?) . Et en contrepoint des élans de solidarité (cf l'épisode du SDF et de son chien, la pompiste qui va raccompagner en voiture Khadija -ici l'habitacle du véhicule se prête à quelques confidences-, le service hospitalier )
Ce trajet dans la nuit d'une femme seule ne peut-il s'apparenter à un nocturne -sens musical ?
Mais il est vrai que la mise en scène, la lenteur risquent de déplaire ...à certains spectateurs!
Colette Lallement-Duchoze