14 novembre 2019 4 14 /11 /novembre /2019 06:32

D'Ina Weisse (Allemagne)

avec Nina Hoss, Simon Abkarian, Jens Albinus 

 

Anna Bronsky est professeure de violon au Conservatoire. Contre l’avis de ses collègues, elle impose l’admission d’un élève, en qui elle voit un grand talent. Avec beaucoup d’implication, elle prépare Alexander à l’examen de fin d’année et néglige de ce fait son jeune fils Jonas, lui aussi élève violoniste et passionné de hockey sur glace. Elle s’éloigne de plus en plus de son mari, si aimant à son égard, le luthier français Philippe Bronsky. A l’approche de l’audition, Anna pousse Alexander vers des performances de plus en plus exceptionnelles. Le jour décisif, un accident se produit, lourd de conséquences…

L'audition

Mais qui est donc Anna Bronsky ?

Un être psychorigide -en harmonie d’ailleurs avec la rigidité stylistique de la mise en scène- qui agirait par procuration ? réaliser avec des  "cobayes"- son fils Jonas ou son élève Alexander - son propre rêve de perfection ? Certes Ina Weisse, n'exclut pas cette approche : après la séquence ratée du quatuor où, violoniste, Anna peine à se concentrer et laisse voler son archet, -consciente de ses propres limites -, elle va exiger  toujours plus de son élève. Exigences qui font fi de la personnalité de l’adolescent et le transforment en bête à concours. Gestes et paroles de plus en agressifs sinon violents

Mais la réalisatrice tout en balisant le parcours de son héroïne de "signaux" (cf retours même furtifs vers le passé, relation au père,  un être intransigeant et sadique, rappels rodomontades du mari, protestations de l’enfant, besoin irrépressible de cette chaleur qui embrase le corps, palpation des seins comme  sensation du  hic et nunc) loin d’expliciter le comportement d’Anna semble opacifier de plus en plus le personnage. Là est un des paradoxes qui font l’originalité de ce film

 

Un film tout en contrastes :

Contraste entre la musique (Bach) et les silences lourds de sens. Contraste entre ce visage que le mari voudrait décrypter et décoder telle une partition et les tourments refoulés, les non-dits. Contraste entre l’assurance apparente (celle d’une fille d’une mère d’une épouse d’une amante d’une professeure que Nina Hoss rend palpable dans son silence même ) et une fragilité tapie au fond de l’être profond !

Notes suspendues (en écho inversé, l’archet qui s’écrase au sol) .

Un film où l'œil est  à l’écoute ; où les regards se croisent,  cherchent à sonder (ou extérioriser) secrets et mystères. Les plans resserrés sur les visages des acteurs s'ils captent leur expressivité n'en cachent pas moins l’horizon de leurs regards (au spectateur de se représenter pleins et déliés ou de déceler l'invisible)

 

Nina Hoss est de tous les plans : filmée souvent de dos quand elle est seule-comme si le visage se dérobait-, face à son mari, son fils ou son élève-, cherchant à imposer sa parole comme elle tend à imposer son propre rythme à la musique de Bach,  elle est, elle restera l’insondable

Et le plan qui clôt le film est pour le moins énigmatique. Le regard émerveillé qu'Anna porte sur son fils en train de jouer du violon (concert donné par l'orchestre des élèves) est malsain -compte tenu du drame qui a précédé...(à ne pas dévoiler...). Et du visage on ne voit que la moitié -comme si l’autre était condamnée à rester figée dans le noir. Cette part obscure de Soi ?

 

Un film qui intrigue à défaut d’envoûter

Un film qui vaut surtout pour l’interprétation de Nina Hoss -elle a d’ailleurs reçu la Coquille d’argent de la meilleure actrice au festival de San Sebastian en septembre 2019

 

Colette Lallement-Duchoze

 

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