Avec Thimotée Robart (Juste) Judith Chemla (Agathe) Djolof Mbengue (Alpha)
Présenté à l’Acid (Association du cinéma indépendant pour sa diffusion), Cannes 2019
Prix Jean Vigo 2019 (ce prix est décerné depuis 1951; il récompense un auteur pour "la qualité de sa réalisation et l'indépendance de son esprit")
Juste erre dans Paris à la recherche de personnes qu’il est seul à voir. Il recueille leur dernier souvenir avant de les faire passer dans l’autre monde. Un jour, une jeune femme, Agathe, le reconnaît. Elle est vivante, lui est un fantôme. Comment pourront-ils s’aimer, saisir cette deuxième chance ?
Même si ça parait fou, j’ai envie que ça continue. Apparais-moi encore, mon beau rêve (murmure Agathe à Juste)
Un film où le Visible et l’Invisible se côtoient, fusionnent, où les vivants et les morts communiquent, où le rêve se nourrit de la présence d’un cher disparu et se délecte de sa chair apprivoisée, où la grâce est charnelle, un film qui renoue avec la mythologie d’Orphée et celle du passeur du Styx, un film où la musique de Gaspar Claus et Benoît de Villeneuve joue sur la "sensualité, les sentiments et le deuil" et progresse vers le romantisme, tout cela n’est-il pas séduisant ?
Mais la coexistence naturalisme fantastique, prosaïsme et poésie peine à être fluide tant elle est alourdie de sa charge démonstrative (le vif-argent et ses connotations, la chemise noire pailletée, les propos du père, entre autres...) et l’interprétation verse parfois dans la mièvrerie et/ou l’afféterie..
Dès lors le spectateur loin d’être habité risque de rester extérieur à une romance vivante et spectrale à la fois !
Deux bémols toutefois
Quand Juste (le choix du prénom n’est pas anodin) prend en charge un mort, il le prie de raconter la scène qui l’aura le plus marqué : ici raccords et fondus font astucieusement communiquer les lieux du souvenir et le présent
Quand Juste arpente, invisible pour les autres, le Paris des Buttes-Chaumont, le réalisateur semble magnifier cet arrondissement, il en fait un personnage qui sera l’habitacle du réel et du fantasme ! De même que la Ville dans son entièreté est la Mémoire de souvenirs murmurés, feutrés, ...immarcescibles ..
Colette Lallement-Duchoze