De Benoît Jacquot
avec Isabelle Huppert (Eva) Gaspard Ulliel (Bertrand) Julia Roy (Caroline) Richard Berry (Régis agent éditeur) Didier Flamand (le père de Caroline) Marc Barbé (mari d'Eva)
Tout commence par une tempête de neige. Eva, troublante et mystérieuse, fait irruption dans la vie de Bertrand, écrivain prometteur. Cette rencontre va bouleverser Bertrand jusqu’à l’obsession et le fera glisser jusqu’à sa perte.
Librement adapté du roman de James Hadley Chase, le film de Benoît Jacquot (présenté au festival de cinéma de Berlin) peine à émouvoir et à convaincre. Même Isabelle Huppert surjoue dans le glacé, transformant en roman-photo ce que d’aucuns nomment un "thriller"
Inutile de comparer ce film avec celui de Losey (1962) pour mettre en évidence les divergences, inutile de le comparer avec Elle de Paul Verhoeven pour répertorier les ressemblances….Certains s'y emploient allègrement
Osons l'affirmer sans ambages : Eva est un film raté
La séquence d’ouverture qui sert de prologue -et qui, ce faisant, doit encoder le film- est beaucoup trop longue, dénaturant ce que précisément elle révèle ; le passage du métro, l’essoufflement du " gigolo", la baignoire, le vol du manuscrit au titre éloquent "le mot de passe", l'auteur un vieux britannique "has been" en Angleterre trop " dark" en France; tous ces "aspects" trop étirés "montrent" en le martelant ce qu’ils auraient dû suggérer
Dès lors c'est le dévergondage d'effets spéculaires : la dualité des personnages (Eva en outre doit changer de look selon qu’elle est prostituée ou bourgeoise amoureuse d’un mari emprisonné), leurs impostures,-que chacun " flaire" chez l’autre- leurs masques et faux semblants ; Eva la mère à tuer par un Oedipe moderne qui persiste à voir en elle la Muse inspirée et inspirante- ; la scène vécue et son adaptation littéraire; les miroirs qui renvoient ad libitum les images du couple détonant; le passage récurrent du train (allées et venues entre Paris et Annecy),
Jusqu’à une certaine façon de filmer: Un tête-à-tête? déplacement trop rapide de la caméra d’un visage à l’autre…censé illustrer une tension intérieure. Que dire de ces ralentis et de ces fondus au noir ? Les décors : théâtre, casino, hôtels, chalet, parloir de la prison s’ils se prêtent aisément à certaines ambiances - par les variantes de couleurs et de lumières- sont filmés de façon telle qu’on a la désagréable impression d’assister à un théâtre filmé (un mauvais théâtre d'ailleurs qui culmine dans la scène de repas avec les parents de Caroline...)
Reste la lumière hivernale
mais une lumière dé-vitalisante
Colette Lallement-Duchoze