4 décembre 2017 1 04 /12 /décembre /2017 04:55

Documentaire réalisé par Robert Bober (France Autriche)

Le documentariste ravive la mémoire de son arrière-grand-père parti de Pologne pour s'installer dans une Vienne moderne et cosmopolite , celle de Stefan Zweig, Joseph Roth, Arthur Schnitzler à la veille de la montée en puissance du national-socialisme qui mettra fin à cette capitale culturelle

Vienne avant la nuit

Ce documentaire s'ouvre sur la première séquence de  "la ronde" de Max Ophüls, (film adapté  de la pièce d'Arthur Schnitzler); long travelling qui fait passer d'une scène de théâtre à un studio, le personnage change d'habit,  il revêt un costume 1900;  Anton Walbrook -au timbre de voix si particulier- incarne le récitant  acteur?, auteur? passant.?..

Ce pré-générique qui sert de prologue va encoder tout  le film. Robert Bober, 86 ans, sera le récitant de "Vienne avant la nuit" . Vienne où s'est installé son arrière-grand-père après avoir été refoulé à Ellis Island alors qu'il gagnait l'Amérique pour fuir la Pologne. Vienne au début du XX° siècle. Vienne capitale des arts et des lettres. Vienne presque cent ans après où se rend le documentariste sur les traces de....cet aïeul ferblantier à Léopoldstadt -quartier où un enfant sur deux était juif...

Seule une photo peut témoigner de son existence, de son passage; alors elle sera viatique au même titre que tous les ouvrages emportés. Afin de faire jaillir en pleine lumière un temps retrouvé..mais aussi exhausser à l'universel, une quête personnelle

Alors que le vieillard à la longue barbe blanche s'inscrit déjà dans la ville "à la mémoire obscurcie" et qu'il l'imprègne -même s'il n'a pas connu ni côtoyé Stefan Zweig, Joseph Roth, Arthur Schnitzler- , tout un jeu de superpositions et/ou de surimpressions va relier différentes strates; et voici que résonne tragique et ambiguë cette phrase de Max Ophüls "j'adore le passé; c'est tellement plus reposant que le présent et tellement plus sûr que l'avenir" ....

 

Questionnement sur l'histoire des lieux et des personnes qui les ont habités, ce documentaire mêle images d'archives, extraits de films, d'entretiens, d'essais, photos de famille, tous commentés par le réalisateur à la voix posée, monocorde et vite lancinante. Train, chambre d'hôtel, café, cimetière, il est aussi là, hic et nunc, omniprésent sachant qu'exhumer le passé -qui est aussi une culture, la sienne, une culture yiddish - c'est le faire exister dans  le présent qui le portait déjà. Tout comme la présence d'une biche dans le cimetière (cf l'affiche) va donner vie aux stèles/mémoires délabrées...

 

Mais cette  méditation   par sa facture assez classique, son imprégnation religieuse, et par certains de ses commentaires, peut laisser certains spectateurs ...à quai...(et j'en fus...)

 

 

Colette Lallement-Duchoze

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