de Kaouther Ben Hania
avec Mariam Al Ferjani (Mariam) Ghanem Zrellin(Youssef)
Présenté au festival de Cannes (Un Certain Regard)
Argument: Lors d'une fête étudiante Mariam jeune Tunisienne croise le regard de Youssef. Quelques heures plus tard Mariam erre dans la rue en état de choc. Commence pour elle une longue nuit durant laquelle elle va devoir lutter pour le respect de ses droits et de sa dignité. Mais comment peut-on obtenir justice quand celle-ci se trouve du côté des bourreaux?
Librement adapté du livre éponyme de Meriem Ben Mohamed -lui-même inspiré par une histoire vécue- le film "la belle et la meute" plonge le spectateur au cœur des ténèbres, dans la nuit de l'Immonde, d'une société qui "banalise le mal" ; mais le diktat institutionnel (ne pas porter plainte quand on a été victime de viol surtout si les bourreaux sont les représentants de l'ordre) n'est pas l'apanage de la société tunisienne .... les menaces de Harvey Weinstein "si tu parles je casse ta carrière" ne sont pas sans rappeler les propos comminatoires des policiers du film "si tu parles tu auras honte toute ta vie" . Cela étant le film n'en reste pas moins un violent manifeste contre la police héritée de Ben Ali !!
La jeune Mariam elle va résister. Résister aux chantages aux menaces aux sarcasmes aux violences verbales et physiques; résister d'abord avec l'aide de Youssef puis forcément seule (Youssef sera incarcéré pour outrage à...). Une nuit d'horreur que ponctuent ses visites à la clinique, à l'hôpital et au commissariat; une nuit filmée en 9 plans séquences (au chapitrage numéroté) entraînant le spectateur dans une (sa) course parfois hébétée "pour que justice soit faite"
D'un côté la Belle qui progressivement après la douleur du trauma va se construire (la lumière du dernier fragment n'est-elle pas son aurore?) de l'autre la "meute" celle des policiers chiens qui aboient leur vindicte et leur "solidarité" en refusant de cautionner le procès-verbal de la plaignante...
D'un côté un individu victime de la violence policière, de l'autre une institution garante de la sécurité; David contre Goliath? Liberté contre sécurité? Une police forte intouchable même quand elle est coupable, de viol en l'occurrence ? Certes un policier (le plus âgé) tente de s'opposer à la dérive de ses "confrères" mais sa démarche sera vite frappée d'inanité...
Alors se taire si l'on veut éviter la guerre civile et les menaces terroristes? Un sophisme hélas répandu dans les sociétés dites démocratiques; et dans le film ce sera l'ultime "argument" censé décourager la jeune femme !!! Accuser la police c'est ternir l'image du pays et saper son système de "sécurité" ...
NON "plutôt mourir" telle est la réponse courageuse de Mariam (admirablement interprétée par Mariam Al Ferjani)
Un film à voir absolument !
Colette Lallement-Duchoze