9 juillet 2017 7 09 /07 /juillet /2017 18:42

Documentaire réalisé par Agnès Varda et JR

 

Présenté hors compétition au festival de Cannes (mai 2017) ce film a obtenu l'Oeil d'or du meilleur documentaire 

Argument:  La cinéaste Agnès Varda et le photographe JR décident de sillonner les routes de France à bord de la camionnette-studio de JR. Ils désirent aller à la rencontre des gens, leur parler, les photographier, développer les photos et les afficher en grand dans leurs lieux de vie. 

Visages Villages

Ce  documentaire à l’allure de road movie et qui in fine se présente comme un montage collage est avant tout un film sur le regard.

 

Regards croisés mais aussi complices des deux artistes ; chacun dans sa singularité (elle cinéaste lui photographe plasticien)  explorant ce champ des « possibles » ; les deux regards se superposant ou se complétant

Regards des personnes sur elles-mêmes quand elles se voient immortalisées en de monumentales photos (même vouées à disparaître) ; le cas de Jeanine dernière habitante d’une rue d’anciens mineurs à Bruay la Bussière, est exemplaire ; car le regard ému qu’elle porte sur sa façade devenue effigie la conforte dans sa lutte contre l’oubli. Le regard et son corollaire : la mémoire ! Le regard contre l’oubli !

Ces regards émerveillés fiers ou bienveillants scellent le pacte qu’a conclu Agnès Varda "aller à la rencontre des gens simples dans ces villages oubliés du grand public" (le titre visages villages qui joue sur les allitérations et la presque parfaite homophonie le dit expressément).

Agriculteurs facteurs carillonneurs femmes de docker, tous ne seront plus de simples anonymes et c’est le regard du spectateur qui désormais va les relier à une autre mémoire, incluant leur individualité dans une fresque collective

 

Nonagénaire (ou presque) Agnès Varda ne cache pas ses problèmes de vision ; une vue floue certes mais largement compensée par une grande écoute. À l’inverse le trentenaire JR se cache derrière ses lunettes noires (à l’instar de Godard ?) et se plaît à jouer (ou être?) le cabotin….

Les différents "clins d’oeil" à Godard (même si le pastiche de la scène du Louvre est un peu longuet et si la séquence finale du rendez-vous manqué était prévisible) constituent une autre forme de regard ; celui d’une cinéaste qui rend hommage au cinéma (le plan sur son œil par exemple n’est pas sans rappeler la scène d’ouverture du chien andalou), et à son ami de la Nouvelle Vague qui a révolutionné le regard sur l’image

 

C’est enfin le regard d’une femme sur elle-même avec ce mélange de légèreté et de sérieux ; sentant sa fin prochaine elle en vient même à la souhaiter (un plan au cimetière de Varengeville-sur-Mer où les deux partenaires assis  sont filmés de dos, et surtout les paroles prononcées sur la tombe de Cartier Bresson dans le minuscule cimetière de Montjustin, en témoignent aisément)

 

Un "documentaire" à ne pas rater !

 

Colette Lallement-Duchoze

Visages Villages
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