Documentaire réalisé par Jean-Stéphane Bron (Suisse, France)
Une saison dans les coulisses de l'Opéra de Paris. Passant de la danse à la musique, tour à tour ironique, léger et cruel, l'Opéra met en scène des passions humaines et raconte des tranches de vie, au coeur d'une des plus prestigieuses institutions lyriques du monde...
Un souffle ! une tornade, parfois ! On passe de l’Opéra Garnier à l’Opéra Bastille, de la danse à l’art lyrique, des réunions avec le directeur aux répétitions, du focus sur le jeune baryton-basse au chef d’orchestre, de la scène aux coulisses. Une sorte de kaléidoscope (bien illustré par le graphisme de l’affiche) ; une ruche en ébullition où chacun participe activement et apparemment avec la volonté de "bien faire" -des danseurs, des jeunes violonistes, des chanteurs, du personnel administratif, à tous ceux qui œuvrent dans l’ombre -costumiers, maquilleurs, coiffeurs, employés de ménage, machinistes, décorateurs, etc.
On retiendra ce plan où une femme, telle une ombre tutélaire, attend derrière le rideau, la diva qui "s’écroule" et lui apporte de l’eau et des mouchoirs ; ou cet autre à l’Opéra Bastille où les jeunes d’une classe de Zep "les petits violons" descendent l’escalator, vers la scène pour la"représentation" de fin d’année, alors qu’en sens inverse une femme de ménage monte vers les pièces à nettoyer. (ascenseur social -inversé?) ou encore ce plan prolongé sur deux régisseuses qui en retrait, sur leur console chantent -pour elles, donc pour nous- la partition...interprétée sur scène pour le "public"
L’Opéra est une Institution. Confrontée à tous les problèmes qui la lient au pouvoir politique et à la culture. Lissner le nouveau directeur -dont le portrait est bien lisse ...- doit gérer une défection de dernière minute, régler le problème de la démission de Benjamin Millepied -cf le film « la relève », annuler des représentations pour cause de grèves, fédérer après les attentats de novembre 2015, discuter avec le régisseur et autres membres du personnel pour rendre les prix plus " attractifs"
Il est comme le fil d’Ariane. Car l’Opéra est un "monstre" -à l’instar du taureau présent sur scène pour Moïse et Aaron -, un monstre aux organes puissants et multiples, répartis des sous-sols aux combles et dans les entrailles duquel nous pénétrons grâce à ce documentaire, avec frénésie comme happés par sa musique intérieure. Bien sûr nous entendons Wagner (répétition des Maîtres chanteurs de Nuremberg) Schoenberg (répétition de Moïse et Aaron) ou Beethoven (pour les "petits violons"); nous serons subjugués par ces voix à la tessiture extraordinaire (Mikhaïl Timochenko, Olga Peretyatko). Mais il y a cette respiration humaine (souffle susurrement martèlement des pas etc..) et surtout nous captons la "voix" du réalisateur qui, par des raccords audacieux et sans se soucier de chronologie, a voulu mettre sur le devant de la scène moins un "spectacle" qu'une mosaïque de relations humaines
Un documentaire à ne pas manquer
Colette Lallement-Duchoze
"le désir qui anime cette tour d'ivoire me semble être précisément ce qui fait cruellement défaut à "l'extérieur", dans nos sociétés qui n'arrivent plus ou très difficilement à s'inventer un avenir commun" (dépliant AFCAE)