de Maha Haj
avec Hanan Hillo, Amer Hlehel, Ziad Bakri
argument:
En Palestine, le quotidien d'une famille: les parents vivent à Nazareth, leur fils Tarek, un célibataire endurci à Ramallah, leur fille va accoucher, la grand-mère perd peu à peu le Nord, le fils aîné Hisham s'est expatrié en Suède... A chacun ses conflits et ses rêves d'une autre vie...
Voici une suite de saynètes sur les tracas d’une famille. La cinéaste Maha Haj -Palestinienne née à Nazareth- les filme en montage alterné, avec sobriété et un humour pince sans rire. (à la manière de Eila Suleiman ; elle fut d'ailleurs son assistante pour " intervention divine "). Caméra souvent fixe pour filmer les parents -lui de profil scotché devant son écran de PC, elle de dos vaquant aux occupations domestiques , ou de face en train de tricoter ou scotchée devant l’écran Télé. Répétition comique qui tient du gag : l’arrivée de Maïssa, l'amie de Tarek, est toujours annoncée par le jeune homme à bicyclette....Dans chacun de ces tableautins l’accent est mis sur des broutilles, des bisbilles contenues dans d’impassibles plans fixes ce qui confirmerait une première impression, celle d’assister à une chronique familiale intimiste et plaisante
Mais ne nous méprenons pas. La distance ironique et la feinte nonchalance n'occultent pas la dure réalité de la " colonisation "; toujours présente, elle triomphe dans cette séquence du check point – Maïssa et Tarek sont pris en " flagrant délit " alors qu’ils se chamaillaient (fouilles arrestation garde à vue) et même si le " drame " est détourné (attendant d'être "libérés", les deux personnages exécutent un tango chaloupé très sensuel) il n’en reste pas moins prégnant. Quand Georges, garagiste, aux allures de benêt, éternel enfant cocooné par sa femme enceinte, est " choisi " pour faire un film, on le met en garde sur les options des cinéastes américains : quelle image donnera-t-on du Palestinien, en Occident?
Plus subtiles, les allusions sous forme de métaphores : l’éclatement géographique de la famille illustre une réalité bien tangible : le problème de la frontière israélo-palestinienne, de part et d’autre du mur dit de " séparation "; la grand-mère qui perd le Nord peut symboliser la perte de repères de même que l’éloignement de Hisnam en Suède concrétise le douloureux problème de l’exil, forcé
Cela étant, personal affairs ne prétend pas être une allégorie ni un film " militant ".
Mais ces " affaires personnelles " -à portée universelle d’ailleurs- ont ceci de particulier : le seul lien d’unité dans cette famille " ordinaire " n’est-il pas l’absurdité de se sentir étranger sur sa propre terre…. ?
Colette Lallement-Duchoze