De Kôji Fukada Japon
Avec Tadanobu Asano Mariko Tsutsui, Kanji Furutachi
Prix du Jury Un Certain Regard Cannes 2016
Argument: Toshio et sa femme Akié mènent une vie paisible avec leur fille Hotaru. Un matin un ancien ami de Toshio réapparaît après une décennie en prison. A la surprise d'Akié Toshio lui offre emploi et logis. Peu à peu ce dernier s'immisce dans la vie familiale, apprend l'harmonium à la fillette et se rapproche doucement d'Akié...
Une construction bipartite avec effets de miroir inversé (métamorphose des deux parents 8 ans après la " tragédie " ; tonalités différentes) une indéniable maîtrise formelle et un art de l’ellipse au service d’une dénonciation sans appel de la " structure familiale ", de ses fondements hypocrites, le film de Kôji Fukada qui a obtenu le prix du jury (un certain regard Cannes 2016) souffre cependant de longueurs en I et d’une certaine complaisance dans le dolorisme en II
Au tout début le film peut s’apparenter à une chronique familiale. Le réalisateur en dénonce d'emblée la facticité ; il semble opposer apparence (avec des plans et cadrages stricts) et dissonance (à l’instar de ce métronome qui continue à battre la mesure alors que Hotaru l’enfant a cessé de jouer..). Le manque de communication entre les époux Akié et Toshio, éclate avec l’arrivée de l’Autre (admirablement interprété par Tadanobu Asano que nous avions vu en " revenant " dans " l’autre rive "). Qui est-il ? Que cache-t-il sous des dehors obséquieux ? " là-bas on maigrit " dit-il à " son ancien ami " Toshio qui l’accueille, l'embauche, le loge et le nourrit...Quel mystère enfoui dans la conscience de Toshio ?
Jusque-là taciturne et introverti, le père sera "violent" et presque prolixe après le basculement tragique. L’Autre, Yasaka (est-il responsable de cette tragédie??) restera hors champ durant cette seconde partie mais son "fantôme" hante les consciences (Akié séduite par ses avances, le voit en rêve, Toshio lui est convaincu de subir une forme de karma). Le passé et sa " mauvaise conscience " pour Toshio, le refoulé pour Akié, victime désormais de troubles du comportement (dont la phobie de l'hygiène!)
Le huis clos initial s’est encore étréci….
Le parallèle entre deux plans qui se font écho (le premier immortalisé par une photo où l’on voit allongés heureux les 4 protagonistes, le second où Toshio tente de ranimer les 3 corps allongés sur la grève) est comme une rime intérieure dans un théâtre du désordre et de la cruauté... Et aux battements intempestifs du métronome se substituent les pulsations (qui vont s'amenuisant) d'un coeur qui bat!
L’histoire racontée un matin par l’enfant (en I) acquerra rétrospectivement une signification particulière: il existe une espèce d’araignées où la mère se laisse tuer par ses enfants ; la mère va au paradis affirmait Akié, non répondait Hotaru car elle aussi a tué sa mère.
Comme s'il n'y avait que l'enfer pour les araignées ….
Colette Lallement-Duchoze