19 août 2016 5 19 /08 /août /2016 07:47

Film allemand de Maren Ade

 

avec Peter Simonischek, Sandra Hüller 

 

Présenté au festival de Cannes 2016, boudé par le jury mais ovationné par la critique, ce film a  reçu  le  Prix FIPRESCI, (fédération internationale de la presse cinématographique) 

Argument: Quand Inès, femme d'affaires allemande mutée à Bucarest, voit son père débarquer sans prévenir, elle ne cache pas son exaspération. Sa vie parfaitement organisée ne souffre pas le désordre. Mais Inès ne semble pas vraiment heureuse. Alors son père encombrant et dont elle a honte fait tout pour l'aider à retrouver un sens à la vie en s'inventant un personnage, le facétieux Toni Erdmann...

Toni Erdmann

Au tout début c'est Winfried le personnage principal: des saynètes d'inspiration réaliste insistent sur son goût un peu potache du déguisement (en Toni avec le facteur, en zombie avec sa mère qui reste impassible) et sur sa bonhomie profonde que tempère l'autodérision. Le plan prolongé sur la façade de sa petite maison de province préfigure en miroir inversé les intérieurs luxueux où vit sa fille

Dès que se met en place puis en scène la relation père/fille un glissement s'opère :conflit générationnel, opposition de deux modes de pensée et de vie, avec pour toile de fond économique une Europe ultra libérale. Le père ex soixante-huitard (?) a gardé intacts et comme inviolés un esprit de subversion et un idéal humaniste. Inès incarne l'executive woman avec ce sérieux aussi étriqué que ses tailleurs. Dans un univers dominé par les mâles, elle est une tâcheronne; son job? externaliser les activités d'une multinationale, en d'autres termes proposer des plans de licenciement afin de sous-traiter certains secteurs et surtout d'augmenter les profits). Or c'est précisément sur ses lieux de travail (en Roumanie) que le père désireux avant tout du bonheur de sa fille vient semer un trouble qui ne sera jamais tempête.

Il sera Toni Erdmann (soit un Winfried avec dentier et perruque), qui s'inventera et assumera  différents "rôles" afin de pénétrer au plus près  la sphère professionnelle de sa fille

En fait le comique naît moins de l'opposition entre bouffonnerie et sérieux (comique de situation) qu'entre dynamisme et statisme (comique de caractère et parfois d'inversion). Car la réalisatrice semble s'intéresser à la matérialité organique des rôles; ce qui passe par l'affect pour le ridicule et bouffon Toni, par l'inexpressif pour sa fille en représentation ou en mission, et c'est du craquèlement plus ou moins prononcé de ces apparences (chacun étant affublé de son "persona") que naîtra le comique; comique grinçant mais jamais hilarant (hormis peut-être dans la séquence où Inès a convié ses collègues à une soirée et que le père en "kukéri" impose sa masse "velue" aux protagonistes dévêtus; encore que.. avant d'opter pour la nudité Inès se démenant avec une robe moulante, gesticule à la façon des grands comiques traditionnels; une fourchette prolongeant la métaphore de la râpe...)

 

Si le film procède par étapes dans la "reconquête" ou la "remontée de l'enfance", elles se sabordent par des effets inattendus de basculemnts (autre force et originalité de Toni Erdmann) ce qui motive -paradoxalement- une forme d'étirement, que certains spectateurs assimileront à des longueurs...

 

On restera subjugué par le duo Peter Simonischek (ex prothésiste dentaire....si...si...) et Sandra Hüller

 

Colette Lallement-Duchoze


 

 

 

 

 

 

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