Documentaire réalisé par Eliane de Latour 2014 (France Côte d'Ivoire)
Avec Bijou Ballo, Safia Koné, Maïmouna Fofana, Aminata Sidibé…
Musique : Eric Thomas
Bel Air, ghetto de la banlieue d'Abidjan: la réalisatrice a passé plusieurs mois à photographier des prostituées; "elles monnayent leur corps pour avoir un peu de liberté quitte à vivre dans le déshonneur"; analphabètes, sans papiers, "maudites filles foutues" ces "go" sont au ban de la société ivoirienne. Défilent des clichés que commente Eliane de Latour. C'est le prologue. Car c'est à partir de la "confiance" entre les femmes et la cinéaste (ses portraits leur ont donné un "reflet de dignité") qu'un autre projet plus ample se concrétise trois ans après, ce sera "little go girls".
Certaines ont rejoint la Casa (lieu de vie collectif que la réalisatrice a monté grâce à l'argent récolté par la vente des photos) et voici qu'émergent , souveraines, Bijou, Blancho, Chata, Mahi...
Le parti pris? Filmer sans narration sans parole ou presque. Sur l'écran quelques encarts explicatifs et parfois la voix off de la cinéaste informent sur l'identité et/ou la motivation . Ne pas verser dans le misérabilisme, ne pas mettre en avant les figures du proxénétisme (on les devine quand certaines "go" se parent pour leur "vie nocturne", on les devine quand alanguies ou lascives elles se reposent ...).
Mais capter par une posture, par un visage, par un regard, par un geste, par une cicatrice, une expression intérieure. Varier les angles de vue. Soigner les cadrages et les plans fixes. Quelques plans sur l'apprentissage de la lecture et de l'écriture, sur les travaux domestiques, les "corvées".
Au final, une victoire: disposer de cette fameuse "pièce d'identité"; la mer ne sera plus la sépulture des anonymes
Des beautés sculpturales. Des mères aimantes. Femmes d'abord avant d'être prostituées!
Ni trop réaliste, ni trop militant, ce film/documentaire qui tient plus de l'éthologie que de l'ethnologie, ce film sur la "dignité reconquise", témoigne de l'empathie de son auteur -connivence que renforce la proximité de sa caméra, qui, paradoxalement, semble filmer comme à distance!
Colette Lallement-Duchoze
voir le making of de la casa des go (21')
http://www.africultures.com/php/index.php?nav=article&no=13488