De Mikhaël Hers
Avec Anders Danielsen Lie (Lawrence), Judith Chemla (Zoé), Marie Rivière (Adélaïde), Féodor Atkine (Vladimir), Dounia Sichov (Ida), Stéphanie Déhel (Sasha), Lana Cooper (June), Thibault Vinçon (David), Laure Calamy (Anouk), Jean-Pierre Kalfon (Faris), Josh
Musique David Sztanke « Tahiti Boy »
Balade et ballade, espace et temps, douleur et lumière, le film de Mikhaël Hers Ce sentiment de l'été mêle tout cela avec une douceur qui n'exclut pas la violence du deuil. Sasha brusquement s'effondre sur une pelouse; alors que le spectateur avait assisté à son réveil, qu'il l'avait suivie à son travail, qu'il s'était déjà familiarisé avec elle; cette scène inaugurale va donc l'inclure de façon quasi tangible dans le processus de deuil. Comment "survivre" quand on a perdu l'être aimé ? Sasha "femme" de Lawrence, Sasha soeur de Zoé?
C'est par des formules apparemment anodines (on se répète combien on est content de se retrouver en se donnant la bise), mais c'est surtout par des regards que les personnages échangent leurs émotions (et l'interprétation de Judith Chemla en Zoé est à cet égard exemplaire; Anders Danielsen Lie lui était peut-être plus convaincant dans Oslo, 31 août).
Le titre semble insister à la fois sur la légèreté (c'est la saison estivale c'est la lumière la chaleur) et la nostalgie (en ce sens qu'il se réfère au passé ce dont témoignent l'adjectif "ce" et le substantif "sentiment"); et d'ailleurs par détestation du numérique, le réalisateur a filmé en 16mm ce qui donne à l'image une sorte de patine....(celle précisément des souvenirs, du passé)
L'été? Le film nous transporte de Berlin -l'été de la mort de Sasha-, à Paris l'été suivant, puis à New York -soit le troisième été-, avec un passage à Annecy (où les parents de Sasha ont un chalet; et ce n'est pas pur hasard s'ils sont interprétés par les acteurs rohmériens Marie Rivière et Féodor Atkine). Douceur estivale? là ce n'est pas un simple cliché. Les décors urbains, les espaces parcourus, les habits légers (short le plus souvent pour Zoé) les couleurs, tout est empreint de cette lumière jamais trop vive qui vient moirer une terrasse, s'alanguir sur un banc, être à l'affût dans une embrasure de fenêtre, ou encore se réfracter et se diffracter sur le lac d'Annecy.
Une atmosphère bien particulière préside ainsi au souvenir, en l'enserrant dans sa confrontation avec le présent. "Je n'y arriverai jamais" confie Lawrence un jour à Zoé "comment tu fais toi?"
Et pourtant....L'affiche est d'ailleurs éloquente: le personnage est vu de dos sur une plage mais son être semble attiré par ...Et après avoir vu le film on pourra gloser ad infinitum !
Colette Lallement-Duchoze
Oui c'est un film réussi sur le deuil, bien maîtrisé, doux, sensible, intelligent.
Je pencherai plutôt pour l'attachante personnalité et le jeu de l'acteur norvégien si ténu, si intériorisé.
On tremble à l'idée d'un tel sujet réalisé par un cinéaste à la sauce américaine!...
Ce film est littéraire, à l'opposé de ces téléfilms qui nous gavent par leur pseudo-réalisme. Là aucune prétention de style mais de l'épure, sans effets tire-larmes.
Ce film nous touche au plus profond de l'âme.
Serge 23/02