17 novembre 2015 2 17 /11 /novembre /2015 07:13

De Kore-Eda Hirokazu

Avec Haruka Ayase (Sachi) , Masami Nagasawa (Yoshimo) , Kaho (Chika) Suzu Hirose (Suzu Asano)

Film japonais présenté en Sélection Officielle au Festival de Cannes

 

 

 

Argument: Trois sœurs, Sachi, Yoshino et Chika, vivent ensemble à Kamakura (ville balnéaire au sud de Tokyo) . Par devoir, elles se rendent à l’enterrement de leur père, qui les avait abandonnées une quinzaine d’années auparavant. Elles font alors la connaissance de leur demi-sœur, Suzu, âgée de 14 ans. D’un commun accord, les jeunes femmes décident d’accueillir l’orpheline dans la grande maison familiale

Notre petite soeur

C'est à la façon d'Ozu que Kore-Eda Hirokazu filme  les scènes -et elles sont nombreuses- des repas partagés;  il affectionne aussi les plans fixes -soeurs vues de dos mais dont on peut imaginer le regard scrutant un infini de paysages comme autant de paysages mentaux; ou vues de profil en plans américains-  comme pour souder une fratrie. Son  théâtre d'ombres grises, qui fait suite au noir du deuil, contraste avec les scènes  aux couleurs vives (match de foot, cuisines). Alternance constante entre intérieurs et extérieurs (un tissu semi urbain et/ou la plage). Chuchotements ou rires; pleurs réprimandes; inconscience et insouciance, érotisme revendiqué (cf le plan inaugural et en écho celui où Suzu offre son corps ruisselant de pluie, à sécher)  ou pudeur;  c'est toute une palette de sensations de sentiments mais aussi de non-dits, que le cinéaste explore, restitue par bribes et propose à notre regard souvent subjugué par l'élégance et la délicatesse de ces jeunes filles!

Chronique familiale que cette bal(l)ade légère et distanciée dans un univers sororal?

Ce n'est pas un hasard si le film s'ouvre sur les funérailles du père: pour le trio des sœurs ce sera un nouveau départ avec la présence acceptée de leur demi-sœur (dernier lien avec le père); ce n'est pas pur hasard si vers la fin on assiste aux funérailles de cette restauratrice (spécialiste des maquereaux frits ou des toasts d'alevins) :la sœur aînée Sachi sorte de marâtre dans ce  gynécée familial, accompagne aussi de par son métier d'infirmière, les mourants en soins palliatifs. Même désir exaucé chez les deux disparus "voir les cerisiers en fleurs" Or n'était-ce pas une voûte de cerisiers qui accompagnait tutélaire la balade  de Suzu et de son compagnon timide mais follement amoureux?

Les cerisiers et ces pruniers -dont les fruits servent à faire des liqueurs -Sachi offrira à sa mère le dernier bocal datant de l'époque de la grand-mère;-ces arbres, ces fruits comme des symboles et qui vont peut-être dans cette apparente chronique familiale, effacer les spectres du passé... Spectres à peine suggérés par des allusions ou plus clairement identifiés lors de conversations.

Mais peut-être... que l'incapacité à "dire" les choses, même dans des altercations plus violentes -où une tierce personne  met fin aux hostilités- serait  la clé de cette harmonie sororale !!!

 

"Suzu si tu veux parler de ton père..." Oui. Certes.  Mais ce sera après le temps du film....

 

Colette Lallement-Duchoze

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