19 septembre 2015 6 19 /09 /septembre /2015 15:08

 Corbo était le titre de ce film de Mathieu Denis, lors de sa sortie au Canada en 2014

 Acteurs:  Anthony Therrien, Antoine L'Ecuyer, K. Tremblay

Insoumis

"Tu allais Jean Corbo au rendez-vous de ton geste" cet extrait du poème de Gaston Miron "Le Camarade" sera cité dans le générique de fin.

Qui était Jean Corbo? Un adolescent de 16 ans, italo-québecois (les élèves dans la classe qu'il intègre en milieu d'année, ricanent en le traitant de "Rital"). Conscient de la douleur des "opprimés", épris de "justice sociale" lui qui est issu d'un milieu assez aisé, est décidé à lutter coûte coûte contre elles en s'inspirant -entre autres- du texte de Fanon qu'il dévore en cachette (Le colonialisme n'est pas une machine à penser, n'est pas un corps doué de raison. Il est la violence à l'état de nature et ne peut s'incliner que devant une plus grande violence ); avec des "camarades" il commencera par distribuer des tracts (La Cognée) qu'il cache sous son lit; puis il participe à des attentats pour le compte d'une branche clandestine du FLQ (Front de Libération du Québec; un Québec alors "colonisé" par un Canada anglophone): la fabrication très méticuleuse de "bombes" artisanales par un "spécialiste", avec gros plans sur aiguilles et clous,  pourrait faire sourire..

Nous sommes en 1966: les conditions politiques et sociales sont évoquées  au tout début (texte sur fond noir). Mais le réalisateur va concentrer son propos sur la courte période de mars à juillet 1966, de même qu'il "resserre" son film sur le personnage de Jean Corbo; de ce fait l'adolescent peut incarner l'innocence sacrifiée au nom d'un idéal (le film n'est pas pour autant un biopic...)  Comme le réalisateur, de son propre aveu, s'est beaucoup documenté, le film met en évidence d'autres thèmes: soumission de la femme (la mère de Jean est discrète par nécessité; c'est le père qui est tout puissant); sévérité de l'enseignement (un collège très conservateur où le professeur d'histoire s'oppose violemment à ceux qui oseraient mettre en doute l'histoire du pays juste après la seconde guerre mondiale, une histoire telle qu'elle doit être enseignée, transmise aux générations, même si elle s'inscrit en faux contre le factuel!!); difficile intégration des étrangers (ici les Italiens)

L'alternance entre les scènes familiales (quartier Mont Royal) et les rendez-vous avec le groupe (réunions discussions préparations des attentats  -le quartier St-Henri, celui des déshérités), le recours systématique à des couleurs sombres ou mordorées, une musique suggestive signée Alary, tout cela crée de bout en bout une atmosphère, et fait qu'on "oublie" le côté didactique souvent déplaisant (voir par exemple les dialogues entre père et fils, ou les dissensions au sein du groupe, sur le bien-fondé du recours à la violence "militant oui, meurtrier non", qui eût été assez plombant voire caricatural!

Le film est sorti en 2014 en première mondiale au Festival de Toronto où il a été sélectionné dans le Canada’s Top Ten. En 2015, il a été présenté en compétition dans la section Génération de la 65e Berlinale. Considéré comme "une œuvre de première nécessité car il traite avec justesse d’un moment encore douloureux de l’histoire du Québec, enterré au fin fond des manuels scolaires. 50 ans après les événements, le film s’avère donc une pierre importante à l’édification de notre mémoire collective et permet également de mieux saisir le moment présent"

Aura-t-il un impact en France? On peut en douter....Dommage!

Colette Lallement-Duchoze

Il serait intéressant de "comparer" les deux affiches

Voici celle de  Corbo quand il est sorti au Canada

Insoumis
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