De Paolo et Vittorio Taviani (2014)
Avec Riccardo Scarmacio, Kim Rossi Stuart, ....
Le titre original "Maraviglioso Boccaccio" (= merveilleux Boccace) nous informe d'emblée sur les intentions des frères Taviani: rendre hommage au "père de la prose italienne". À la limite, il serait plus question de forme " l'art de conter" que de fond. Il serait donc vain de comparer "contes italiens" (il y en aura cinq) -certes librement inspirés du Décaméron- avec l'oeuvrre de Pasolini puisque les frères octogénaires ont opté pour un parti pris inverse: chez eux ni bouffonnerie, ni "grotesque", ni anticléricalisme forcené, un opus non irrévérencieux; car même dans le traitement de la "fornication" -ah cette abbesse prêchant l'abstinence, elle-même prise en flagrant délit de péché ...- la scène n'a rien de libertin et ne provoque qu'un léger sourire. Et que dire de la farce où un attardé mental se convainc d'être invisible? Kim Rossi Stuart en fait trop et l'effet attendu tombe à faux! Car il faut bien l'avouer tout est bien lisse, bien académique dans ce film. À commencer par ces jeunes personnes (3 hommes et 7 jeunes filles) qui, rescapés de la peste qui ravage Florence, installés dans une demeure en Toscane, récitent chaque jour un "conte" Ils évoluent dans une nature qui semble inviolée; mais dans les intermèdes (scène de fabrication du pain, course vers un point d'eau, babillages, attouchements, etc..) ils semblent assez "gauches" dans leur déambulation, même si leur beauté qui épouse le paysage toscan, renvoie à des peintures préraphaélites! (plus évidentes que celles du Quattrocento!)
La scène d'ouverture en revanche frappe à la fois par son réalisme, son rythme et sa composition musicale: nous sommes à Florence: un homme va se jeter du haut d'une tour, un chariot transporte les morts vers les charniers, la foule s'attroupe et/ou recule; gros plan sur des bubons pestilentiels (mais la pestiférée sera sauvée par l'amour et c'est le thème d'un conte...bientôt récité par la ressuscitée elle-même qui a rejoint le groupe des rescapés...)
Ainsi cette ouverture dit simultanément l'urgence d'aimer (face aux pires catastrophes et à la mort) et l'urgence de le conter (en des récits exemplaires ou métaphoriques)!
Colette Lallement-Duchoze